19/03/2024
Michaël
Accueil 9 Civilisations anciennes 9 L’archéoacoustique et ses découvertes dans les sites antiques.

L’archéoacoustique et ses découvertes dans les sites antiques.

Plongez dans l’univers captivant de l’archéoacoustique, où l’archéologie rencontre l’acoustique pour révéler les secrets sonores de l’histoire. Découvrez comment nos ancêtres utilisaient le son dans leurs sanctuaires et lieux sacrés, et laissez-vous transporter par les énigmes acoustiques qu’ils nous ont laissées. Partez à la découverte de deux sites antiques remarquables, où la résonance acoustique était utilisée à son plein potentiel… mais dans quel but ?

Sans acoustique, l’archéologie est sourde… L’anthropologue Ezra B. W. Zubrow

Les Secrets de l’Archéoacoustique dans les sites antiques

L’archéoacoustique, une discipline en plein développement, se concentre sur les propriétés acoustiques des sites mégalithiques anciens et de certaines grottes néolithiques. Traditionnellement, les archéologues se concentraient principalement sur les vestiges physiques dans leurs recherches. Cependant, l’intégration de l’acoustique nous offre une compréhension plus profonde des civilisations anciennes en explorant comment elles utilisaient le son dans leurs espaces sacrés.

Les recherches pionnières en archéoacoustique, menées par Steven J. Waller en 1997, ont mis en évidence une corrélation entre l’emplacement des peintures rupestres, des gravures et les propriétés acoustiques de certaines grottes

illustration rupestre

« On peut démontrer qu’avec l’echo des voix émanent de la surface des roches aux endroits décorés de figures humaines. » (Source:American Indian Rock PDF)

Aujourd’hui, l’archéologie du son révèle que de nombreux sites et structures anciens à travers le monde possèdent des propriétés acoustiques particulières. Par exemple, Chavín de Huántar, un site dans les Andes péruviennes, est célèbre pour les caractéristiques sonores de ses ruines. Les chercheurs suggèrent que les habitants de Chavín utilisaient ce site pour des rituels, en jouant des trompettes de conque, nommées pututus, qui créaient des échos réverbérés remarquables dans la structure.

Le célèbre site mégalithique de Stonehenge a également subi une étude acoustique. L’étude a révélé que le cercle de pierre se comportait à l’image d’une chambre sonore, construit pour amplifier le son à l’intérieur de celui-ci, tout en empêchant les bruits extérieurs d’y pénétrer. 

maqquette de Stonehenge dans un laboratoire acoustique

En conséquence, il est plausible de penser que les rituels tenus à l’intérieur de Stonehenge étaient destinés principalement à un petit groupe d’initiés autorisés à entrer dans le cœur du monument, plutôt qu’à une large foule à l’extérieur. Cette particularité acoustique soulève des débats sur les intentions des constructeurs : était-ce un choix délibéré ou un simple hasard ? À ce jour, il n’existe pas de réponse définitive à cette question.

Cependant, dans cet article nous allons mettre en évidence deux sites anciens aux propriétés acoustiques étonnantes, qui nous invitent à reconsidérer la véritable intention des anciens bâtisseurs.

L’archéoacoustique au cœur de l’hypogée Hal Saflieni.

Traces mystérieuses des Cart Ruts de Malte

Malte est un petit État situé au cœur de la Méditerranée. Selon les experts, il aurait été peuplé dès 5 200 av. J.-C.

Sur cette île, on trouve des monuments architecturaux parmi les plus anciens du monde, connus sous le nom de Ggantija. L’un de ces monuments est un temple qui précède les pyramides de 1 000 ans et qui se trouve au cœur de l’île de Gozo.

Ce site étonne les experts par sa taille phénoménale, ainsi que par la présence de monolithes alignés pesant plus de 20 tonnes chacun.

Le lieu est également célèbre pour ses mystérieuses « Cart Ruts« , qui forment deux sillons parallèles s’étendant parfois sur des kilomètres.

Cependant, le mystère s’épaissit lorsque des ouvriers découvrent par hasard en 1902, un étrange sanctuaire souterrain. Le sanctuaire baptisé Hypogée Hal Saflieni est creusé à même la roche et s’étend sur 3 niveaux. Les archéologues affirment aujourd’hui avec certitude que l’hypogée Hal Saflieni était utilisé au néolithique non seulement comme dépôt d’ossements, mais aussi comme sanctuaire à usage rituel.

Or, au cœur de ce sanctuaire se trouve une pièce nommée « la chambre de l’oracle » en raison de ses qualités acoustiques.

Intérieur mystérieux de l'Hypogée de Ħal-Saflieni à Malte

La chambre de l’oracle comprend une ouverture haute dans le mur donnant sur une niche décorée, appelée ‘niche de l’oracle’. Cette niche, grâce à son écho, permet de diffuser les sons dans tout le complexe.

Selon l’archéologie traditionnelle, la réverbération sonore serait simplement due à la conception architecturale du temple, et la niche aurait servi de support pour une statue ou un objet culturel. Toutefois, des chercheurs spécialisés dans l’acoustique du site contestent cette interprétation et proposent une conclusion radicalement différente.

Un son qui agit sur l’activité cérébrale.

En février 2014, des chercheurs spécialisés dans l’étude acoustique des sites anciens se sont réunis à Malte pour leur première conférence internationale. Selon Linda Eneix, organisatrice de l’événement, l’objectif était d’étudier de manière responsable le comportement du son dans des espaces anciens et son utilisation par les peuples anciens.

Suite à cette conférence, une étude publiée en juin 2015 dans la revue d’anthropologie et d’archéologie a analysé l’acoustique de l’hypogée Hal Saflieni à Malte. Cette étude a révélé que les sons dans la chambre de l’oracle de l’hypogée résonnaient de manière spécifique, influençant potentiellement l’activité cérébrale. Notamment, une double fréquence de résonance à 70Hz et 114Hz a été détectée, qui, lorsqu’activée par une voix masculine, stimulait la résonance dans tout l’hypogée. Des effets similaires étaient observés avec des instruments à percussion. Revue d’anthropologie et d’archéologie juin 2015 )

Ces découvertes suggèrent que les chambres, dotées d’une résonnance optimale pourraient avoir servi pour des événements spirituels. Linda Eneix recommande une collaboration avec des neurophysiologistes pour mieux comprendre l’impact de ces sons sur le développement du cerveau humain.

schéma montrant l'impact du son sur le cerveau humain

Les habitants de l’île de Malte utilisaient-ils la chambre de l’oracle comme une caisse de résonance ? Est-ce que l’acoustique du site servait à influencer l’activité cérébrale ? Bien que ces idées restent hypothétiques, un site éloigné de Malte, présentant des caractéristiques similaires, suggère des conclusions comparables.

Les propriétés acoustiques dans les grottes de Barabar en Inde.

Les Grottes de Barabar, situées dans le Bihar en Inde, sont un ensemble remarquable de sept grottes artificielles, les plus anciennes de l’Inde, datant du IIIe au IIe siècle avant J.C. Elles furent édifiées sous le règne de l’empereur Ashoka. Ces grottes, taillées dans un gigantesque bloc de granit brut, sont un témoignage exceptionnel de l’architecture ancienne et de l’ingéniosité humaine de cette période.

grottes de Barabar dans la région du Bihar en Inde
parois rocheuses à l'intérieur des grottes de Barabar

Chaque grotte de Barabar comprend deux chambres, dont les surfaces internes ont été méticuleusement polies. Ce polissage confère aux parois un effet miroir d’une grande planéité et une acoustique bien particulière.

Il est important de souligner que le granit, avec sa dureté impressionnante de 7 sur l’échelle de Mohs, se révèle plus résistant que l’acier trempé.  Parvenir à sculpter de telles grottes avec des outils primitifs dans le granit constitue déjà en soi une prouesse technique.

Cependant, être capable de polir les parois internes de cette roche de manière aussi lisse que du verre, sans créer d’espaces négatifs (creux), dans un espace confiné, soulevant une quantité irrespirable de poussière, et le tout sans aucun éclairage, soulève tout de même d’étranges questions. Ce qui est surprenant aussi, c’est que les grottes les plus anciennes présentent souvent le moins d’imperfections.

Comment ont-ils atteint un tel degré de précision ? Et quelle en était la raison ?

S’il est difficile d’apporter des réponses sur la première question, le documentaire BAM (Bâtisseurs de l’Ancien Monde) semble en apporter sur la deuxième. Dans ce documentaire, les grottes de Barabar sont décrites comme des caisses de résonnance :

Mais le documentaire nous apprend également que certaines fréquences font vibrer des parties précises du corps humain lorsque l’on se trouve au centre du dôme.

Faut-il en conclure qu’il s’agit là d’une volonté de la part des anciens bâtisseurs ? Est-il possible que d’anciennes civilisations aient acquis la connaissance d’une « science de la résonance » qui nous est inconnue ? D’un point de vue rationnel, cela s’apparente plus à un heureux hasard, et pourtant des études sur la psychoacoustiques appoertent des résultats surprenants…

La psychoacoustique : l’impact du son sur l’activité cérébrale

La psychoacoustique est l’étude scientifique de la perception du son par l’audition humaine et de la manière dont nous interprétons les sons dans notre cerveau, reliant les phénomènes physiques du son aux expériences psychologiques qu’ils provoquent.

Ian A. Cook, directeur associé au Laboratoire de Neurologie, Comportement et Pharmacologie de l’UCLA , et professeur associé de psychiatrie et de sciences biocomportementales a mené une étude pilote en 2008 dans le but d’analyser l’activité cérébrale en réponse aux fréquences sonores comprises entre 90 Hz et 120 Hz.

Ces résultats pilotes intrigants suggèrent que les propriétés acoustiques des structures anciennes peuvent influencer la fonction cérébrale humaine, et suggèrent qu’une étude plus large de ces interactions devrait être entreprise. (https://www.researchgate.net/publication/233638157_Ancient_Architectural_Acoustic_Resonance_Patterns_and_Regional_Brain_Activity )

En outre, l’étude démontre que l’écoute de tonalités à 110 Hz était associée à des schémas d’activité cérébrale régionale qui diffèrent de ceux observés lors de l’écoute de tonalités à des fréquences voisines.

La signification de ces changements dans le fonctionnement du cerveau est ouverte à la spéculation.[…] Cela pourrait être interprété comme une désactivation relative des centres du langage dans le cerveau pour permettre d’autres processus mentaux de devenir plus important.

En d’autres termes, le cerveau réagit en réponse à une fréquence bien spécifique situé autour de 110Hz, sans que l’on puisse fournir d’explications. Or, ce sont précisément ces types de fréquences qui sont révélées dans certains sites antiques.

L’archéoacoustique révèle des sites antiques aux fréquences spécifiques

Une étude menée en 2014 en collaboration avec l’unité de Neurophysiologie clinique de l’Université de Trieste a exploré la résonance acoustique des sites néolithiques.

Cette recherche a révélé que la plupart des sites en pierre résonnent à des fréquences variant entre 90 et 120 Hz, similaires à celles observées dans des études antérieures.

Intéressant, l’étude suggère que chaque individu réagit de manière unique à ces fréquences, ce qui pourrait expliquer la présence de chambres aux fréquences de résonance variées dans certains sites.

L’archéoacoustique est une méthode intéressante d’analyse des sites anciens pour redécouvrir une technique oubliée qui affecte la sphère émotionnelle de la conscience humaine. […]

De plus, cette recherche offre une explication possible de la raison pour laquelle divers sites de pierres néolithiques ont des résonances différentes, mais toujours entre 90 et 120 Hz. […]

Les premiers résultats suggèrent que chaque personne a sa propre sensibilité dans cette gamme avec un effet différent sur l’activité cérébrale. Cela pourrait expliquer pourquoi, dans les temps anciens, chaque chambre était accordée à des fréquences différentes afin d’accroître l’implication émotionnelle de chaque personne participant à un rituel sacré. ( Source: academia.edu )

Curieusement, ces caractéristiques acoustiques se retrouvent dans diverses cultures.

Paul Devereux, un chercheur en archéoacoustique, a mis en lumière d’autres exemples. Ses tests sur le site de Newgrange en Irlande, vieux de plus de 5 000 ans, ont révélé une résonance similaire, entre 95 et 120 Hz. La chambre principale de Newgrange résonne spécifiquement à 110 Hz, ce qui soulève la question de savoir si cela est un hasard.

De plus, il est intéressant d’établir un autre parallèle entre les motifs en forme de spirales sur des sites tels que Newgrange ou Gavrinis et une étude publiée sur la réverbération du son sur des surfaces en spirales.

L’étude publiée dans « Scientific Reports » nous apprend que l’utilisation de surfaces spéciales, appelées métasurfaces conçues en forme de spirale, peut permettre de manipuler de manière précise la propagation des ondes acoustiques. Ces métasurfaces sont composées de puits (ou cavités) en forme de spirale, qui agissent comme des résonateurs. (https://www.nature.com/articles/s41598-021-89487-8)

Existe-t-il une « science de la résonance » qui nous a échappé ? 

Motifs en spirale des sites mégalithiques de Gavrinis  et Newgrange

Il y a 200 000 ans l’homme a considérablement amélioré sa capacité à émettre des sons.

Bien que nous partagions plus de 98 % de notre ADN avec les chimpanzés, des différences notables subsistent entre les deux espèces. Ces différences s’expliquent par la manière dont certains gènes sont activés et exprimés, impactant divers aspects de notre biologie.

Il y a environ 200 000 ans, une mutation particulière a significativement amélioré la capacité humaine à produire des sons complexes, ouvrant la voie à une communication plus élaborée. ( Source: Yerkes.emory.edu ). De plus, les avancées actuelles en biologie et en neuroscience commencent à dévoiler comment la structure du langage et les sons que nous émettons peuvent influencer la connectivité neuronale.

Un exemple intéressant est l’utilisation du mantra ‘om’, souvent décomposé en ‘A-U-M’, dans la pratique de la méditation. Ce mantra, répété depuis des millénaires, est réputé pour ses effets bénéfiques sur le corps humain. Aujourd’hui, des études démontrent que pratiquer le son « om » pendant deux semaines ont suffi à 41 personnes d’améliorer de façon significative leur capacité pulmonaire.  ( Source : International Journal Of Yoga )

D’autres études scientifiques sur le Om suggèrent que la répétition mentale de ce son entraîne une vigilance physiologique et une sensibilité accrue à la transmission sensorielle. ( Source : International Journal Of Yoga )

Depuis la préhistoire, le son a eu un impact significatif sur la psyché humaine : les cris de guerre inspiraient le courage et les tambours chamaniques induisaient des états de transe. Aujourd’hui, diverses études ont confirmé les effets apaisants de la musique et son rôle dans la réduction de la douleur chronique chez certains patients.

Depuis 2011 en France, le CHU de Saint-Étienne utilise la sonothérapie comme soin de support et de confort, au sein de son service de soins palliatifs. ( Source: Reseau-chu.org )

couverture du livre son de guerison

Nos ancêtres ont érigé d’étonnants complexes agissant comme une caisse de résonance. Était-ce dans le but d’exploiter pleinement les vertus du son ?

Nous avons la fâcheuse tendance à sous-estimer la sagesse des anciens. Dans l’inconscient collectif, ils sont souvent perçues comme des peuples primitifs.

Pourtant, les civilisations anciennes démontraient des connaissances avancées dans divers domaines, que ce soit à travers l’alignement céleste de leurs sites avec les solstices et les équinoxes, la durabilité impressionnante de leurs édifices, ou leurs constructions remarquables comme les pyramides de Gizeh, le degré de finition des grottes de Barabar, ou encore Puma Punku. Nous découvrons progressivement des indices qui suggèrent que ces civilisations possédaient des savoirs qui restent encore aujourd’hui en partie mystérieux pour nous.

Et si la « science de la résonance » révélée par l’archéoacoustique provenait elle aussi d’un héritage culturel ?

Partagez vos réflexions, théories, et questions dans les commentaires ci-dessous.

C
Michaël

Michaël

Auteur

Animé par une curiosité insatiable et un esprit toujours en quête de nouvelles découvertes, j’ai exploré une multitude de sujets captivants. Je m’efforce de proposer des contenus uniques sur des thématiques aussi diverses que les civilisations anciennes, les phénomènes ufologiques, les mystères de la conscience, les expériences de mort imminente, et bien d’autres. J’ai également publié des articles pour le magasine Cerveau & Physique Quantique

Je collabore avec des outils d’intelligence artificielle qui me soutiennent uniquement dans le processus de rédaction pour optimiser la clarté et le confort de lecture.

1 Commentaire

  1. Est-il possible qu’il y ai comme une bande son dans ces grottes ? Ou peut être en y apportant un objet ancien extérieur à cette grotte nous pourrions entendre un message ?

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Mzora : Un Mystérieux Cromlech Néolithique au Cœur du Maroc

Mzora : Un Mystérieux Cromlech Néolithique au Cœur du Maroc

Explorez les mystères de Mzora, un cromlech néolithique unique situé au Maroc. Cet article dévoile l’histoire fascinante de ce site mégalithique, de son association avec le géant mythologique Antée aux fouilles controversées de l’archéologue Montalbán. Découvrez comment Mzora, avec ses alignements astronomiques et ses légendes anciennes, continue de susciter des questions captivantes sur son origine et sa fonction. Rejoignez-nous dans une aventure historique et archéologique à travers les âges, dévoilant les secrets cachés de ce monument mystérieux.